Pourquoi une vision collective avec les peuples indigènes ?

Nous pensons qu’il est extrêmement important de collaborer de manière concrète pour les peuples premiers, notamment en Amazonie, en créant des rencontres et des échanges avec ceux-ci et les acteurs européens de tous les milieux.

Nous avons de multiples raisons de penser qu’il est aujourd’hui essentiel d’entendre et de soutenir ces peuples. Tout d’abord, les premières nations ont conservé de forts liens avec leur environnement, une relation vivante à la nature. Cette connexion est restée intacte malgré l’influence de l’Occident avec ses idées du progrès, ses principes d’échange basés sur la monnaie, sa vision de l’éducation et de la religion. Pour la majorité des peuples premiers, la notion de respect et le principe d’inclusivité représentent deux notions essentielles dans leur rapport à la société et à la nature, mais également de manière plus globale. Ils ressentent en effet un amour puissant pour la nature et la forêt et seraient prêts à mettre leur vie en jeu pour préserver leur environnement. A l’heure actuelle, un grand nombre de ces peuples possèdent encore un mode de vie nomade. D’autres vivent en autarcie totale, à l’écart complet du monde moderne, loin de la folie des marchés et de l’influence des politiques.

En outre, malgré une histoire complexe souvent teintée de colonisation et de génocide, ces peuples ont toujours conservé une dynamique résiliente, un sens de l’harmonie et de la valeur commune. Ces valeurs leur permettent encore aujourd’hui de vivre en symbiose avec des environnements vierges. Aujourd’hui, ces peuples sont extrêmement importants pour la sauvegarde de ces derniers espaces vierges, notamment l’Amazonie. Ils représentent d’ailleurs le principal problème des compagnies d’exploitation minière et forestière, car ils les empêchent d’accéder librement aux ressources de la forêt. Ces colons représentent d’ailleurs la menace la plus redoutable pour les populations forestières, comme l’ont montré les exactions commises en Amazonie par les chercheurs d’or et autres aventuriers.

La présence des chercheurs d’or, par exemple, a un impact dévastateur sur les populations indigènes. Ils corrompent les leaders locaux afin de pouvoir rester sur place et créent un climat d’instabilité au sein du groupe, ils abusent des femmes, transmettent aussi des maladies, etc. (Témoignage autour du peuple Yanomani)

Et lorsqu’ils ne se rendent pas directement complices de telles pratiques, les gouvernements centraux et les autorités locales ferment les yeux. « L’Amazonie est une terre sans loi ». Les politiciens sont souvent eux-mêmes de grands propriétaires terriens qui facilitent, voire provoquent les invasions, la déforestation, la monoculture et la progression des sociétés minières. Les dommages infligés aux indigènes sont souvent terribles.

L’Amazonie compte 250’000 indiens et un nombre encore plus important de caboclos, populations métissées installées au bord des fleuves et pratiquant une horticulture de subsistance. Une grande partie de ces habitants de la forêt en dépendent entièrement pour obtenir leur nourriture quotidienne, leurs matériaux, leurs revenus, leur reproduction sociale et leurs médicaments, à travers des systèmes complexes et adaptés qui associent chasse, pêche, cueillette, arboriculture et agriculture permanente.

L’éducation des enfants, les soins aux personnes âgées et infirmes, l’organisation et la direction de nombreux rituels, le maintien de l’ordre et de la conduite commune des choix et besoins communautaires complètent leurs activités. Leur connaissance du vivant fait partie intégrante de leur premier apprentissage. Par exemple, un enfant du peuple Ashaninka, fille ou garçon, aura appris dès l’âge de 5 ans avec son père, à reconnaître toutes les plantes toxiques et les animaux de la forêt, mais aussi tous les antidotes afin de se soigner ou d’aider un proche. À l’âge de 7 ans, il sera capable de se retrouver seul au cœur de la forêt et de s’y abriter, de s’y repérer mais aussi de s’y nourrir en chassant et pêchant.

Pour les peuples indigènes, la préservation des forêts et la promotion d’une agriculture durable vont de pair avec la préservation des savoirs traditionnels. En Amazonie comme ailleurs, la culture est directement liée à la préservation de l’environnement. Pour certaines tribus, faire connaître leur cause est une question de vie ou de mort. Nous pouvons vraiment les aider à conserver leurs modes de vie et leurs traditions.

Mais ces peuples sont également porteurs de grands enseignements pour nous occidentaux. Ils nous rappellent comment nous connecter à la nature. Il est donc urgent que nous leur donnions ici un maximum d’écho en les intégrant à nos réflexions, projets et visions. Les pays développés comme le nôtre ont perdu de vue leur lien avec l’environnement. Ces peuples nous montrent des alternatives à notre idée de progrès. Par exemple, ils voient les plantes, les animaux et les hommes comme une même entité. Ils considèrent la forêt comme un écosystème dont ils font partie, remercient les arbres avant de les couper, etc. Cela pousse à la réflexion.

La médecine de l’Amazonie est d’une richesse et d’une efficacité insoupçonnée. Elle propose une approche harmonieuse avec l’essence du vivant, à l’inverse de notre médecine qui ne voit ce vivant que comme une matière première, reproduisant et utilisant les molécules, sans comprendre le mécanisme précieux de cohérence de la plante dans son ensemble. Certains médecins occidentaux suggèrent d’ailleurs que cette perception restreinte et parcellaire serait l’une des raisons de tous les effets secondaires de notre médecine.

C’est à un élargissement de notre vision que ces peuples nous invitent, bien au-delà de nos idées de durabilité. Ils nous permettent, avec simplicité, à travers la voie du cœur, de nous reconnecter ensemble et à la nature. Ils proposent des réponses à la majeure partie de nos préoccupations, car en découvrant l’immensité de la richesse des Indiens, nous découvrons ce qu’ils peuvent nous enseigner en termes de rapports avec l’espace et la nature, de rapport sain à la vie, de médecine, d’organisation sociale inclusive et humaniste, etc. Face aux défis actuels du réchauffement climatique, leurs pratiques et leurs savoirs sont assurément dignes du plus grand intérêt pour l’humanité en général.